ses serres le crâne dâAdam la première tête
Lâaigle fond de lâhorizon en poussant un grand cri
Et dâAmérique vient le petit colibri
De Chine sont venus ses pihis longs et souples
Qui nâont quâune seule aile et qui volent par couples
Puis voici la colombe esprit immaculé
Quâescortent lâoiseau-lyre et le paon ocellé
Le phénix ce bûcher qui soi-même sâengendre
Un instant voile tout de son ardente cendre
Les sirènes laissant les périlleux détroits
Arrivent en chantant bellement toutes trois
Et tous aigle phénix et pihis de la Chine
Fraternisent avec la volante machine
Maintenant tu marches dans Paris tout seul parmi la foule
Des troupeaux dâautobus mugissants près de toi roulent
Lâangoisse de lâamour te serre le gosier
Comme si tu ne devais jamais plus être aimé
Si tu vivais dans lâancien temps tu entrerais dans un monastère
Vous avez honte quand vous vous surprenez à dire une prière
Tu te moques de toi et comme le feu de lâEnfer ton rire pétille
Les étincelles de ton rire dorent le fond de ta vie
Câest un tableau pendu dans un sombre musée
Et quelquefois tu vas le regarder de près
Aujourdâhui tu marches dans Paris les femmes sont ensanglantées
Câétait et je voudrais ne pas mâen souvenir câétait au déclin de la beauté
Entourée de flammes ferventes Notre-Dame mâa regardé à Chartres
Le sang de votre Sacré CÅur mâa inondé à Montmartre
Je suis malade dâouïr les paroles bienheureuses
Lâamour dont je souffre est une maladie honteuse
Et lâimage qui te possède te fait survivre dans lâinsomnie et dans lâangoisse
Câest toujours près de toi cette image qui passe
Maintenant tu es au bord de la Méditerranée
Sous les citronniers qui sont en fleur toute lâannée
Avec tes amis tu te promènes en barque
Lâun est Nissard il y a un Mentonasque et deux Turbiasques
Nous regardons avec effroi les poulpes des profondeurs
Et parmi les algues nagent les poissons images du Sauveur
Tu es dans le jardin dâune auberge aux environs de Prague
Tu te sens tout heureux une rose est sur la table
Et tu observes au lieu dâécrire ton conte en prose
La cétoine qui dort dans le cÅur de la rose
Ãpouvanté tu te vois dessiné dans les agates de Saint-Vit
Tu étais triste à mourir le jour où tu tây vis
Tu ressembles au Lazare affolé par le jour
Les aiguilles de lâhorloge du quartier juif vont à rebours
Et tu recules aussi dans ta vie lentement
En montant au Hradchin et le soir en écoutant
Dans les tavernes chanter des chansons tchèques
Te voici à Marseille au milieu des pastèques
Te voici à Coblence à lâhôtel du Géant
Te voici à Rome assis sous un néflier du Japon
Te voici à Amsterdam avec une jeune fille que tu trouves belle et qui est laide
Elle doit se marier avec un étudiant de Leyde
On y loue des chambres en latin Cubicula locanda
Je mâen souviens jây ai passé trois jours et autant à Gouda
Tu es à Paris chez le juge dâinstruction
Comme un criminel on te met en état dâarrestation
Tu as fait de douloureux et de joyeux voyages
Avant de tâapercevoir du mensonge et de lââge
Tu as souffert de lâamour à vingt et à trente ans
Jâai vécu comme un fou et jâai perdu mon temps
Tu nâoses plus regarder tes mains et à tous moments je voudrais sangloter
Sur toi sur celle que jâaime sur tout ce qui tâa épouvanté
Tu regardes les yeux pleins de larmes ces pauvres émigrants
Ils croient en Dieu ils prient les femmes allaitent des enfants
Ils emplissent de leur odeur le hall de la gare Saint-Lazare
Ils ont foi dans leur étoile comme les rois-mages
Ils espèrent gagner de