Selected Poems 1930-1988

Free Selected Poems 1930-1988 by Samuel Beckett

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Authors: Samuel Beckett
ses serres le crâne d’Adam la première tête
    L’aigle fond de l’horizon en poussant un grand cri
    Et d’Amérique vient le petit colibri
    De Chine sont venus ses pihis longs et souples
    Qui n’ont qu’une seule aile et qui volent par couples
    Puis voici la colombe esprit immaculé
    Qu’escortent l’oiseau-lyre et le paon ocellé
    Le phénix ce bûcher qui soi-même s’engendre
    Un instant voile tout de son ardente cendre
    Les sirènes laissant les périlleux détroits
    Arrivent en chantant bellement toutes trois
    Et tous aigle phénix et pihis de la Chine
    Fraternisent avec la volante machine
    Maintenant tu marches dans Paris tout seul parmi la foule
    Des troupeaux d’autobus mugissants près de toi roulent
    L’angoisse de l’amour te serre le gosier
    Comme si tu ne devais jamais plus être aimé
    Si tu vivais dans l’ancien temps tu entrerais dans un monastère
    Vous avez honte quand vous vous surprenez à dire une prière
    Tu te moques de toi et comme le feu de l’Enfer ton rire pétille
    Les étincelles de ton rire dorent le fond de ta vie
    C’est un tableau pendu dans un sombre musée
    Et quelquefois tu vas le regarder de près
    Aujourd’hui tu marches dans Paris les femmes sont ensanglantées
    C’était et je voudrais ne pas m’en souvenir c’était au déclin de la beauté
    Entourée de flammes ferventes Notre-Dame m’a regardé à Chartres
    Le sang de votre Sacré Cœur m’a inondé à Montmartre
    Je suis malade d’ouïr les paroles bienheureuses
    L’amour dont je souffre est une maladie honteuse
    Et l’image qui te possède te fait survivre dans l’insomnie et dans l’angoisse
    C’est toujours près de toi cette image qui passe
    Maintenant tu es au bord de la Méditerranée
    Sous les citronniers qui sont en fleur toute l’année
    Avec tes amis tu te promènes en barque
    L’un est Nissard il y a un Mentonasque et deux Turbiasques
    Nous regardons avec effroi les poulpes des profondeurs
    Et parmi les algues nagent les poissons images du Sauveur
    Tu es dans le jardin d’une auberge aux environs de Prague
    Tu te sens tout heureux une rose est sur la table
    Et tu observes au lieu d’écrire ton conte en prose
    La cétoine qui dort dans le cœur de la rose
    Ã‰pouvanté tu te vois dessiné dans les agates de Saint-Vit
    Tu étais triste à mourir le jour où tu t’y vis
    Tu ressembles au Lazare affolé par le jour
    Les aiguilles de l’horloge du quartier juif vont à rebours
    Et tu recules aussi dans ta vie lentement
    En montant au Hradchin et le soir en écoutant
    Dans les tavernes chanter des chansons tchèques
    Te voici à Marseille au milieu des pastèques
    Te voici à Coblence à l’hôtel du Géant
    Te voici à Rome assis sous un néflier du Japon
    Te voici à Amsterdam avec une jeune fille que tu trouves belle et qui est laide
    Elle doit se marier avec un étudiant de Leyde
    On y loue des chambres en latin Cubicula locanda
    Je m’en souviens j’y ai passé trois jours et autant à Gouda
    Tu es à Paris chez le juge d’instruction
    Comme un criminel on te met en état d’arrestation
    Tu as fait de douloureux et de joyeux voyages
    Avant de t’apercevoir du mensonge et de l’âge
    Tu as souffert de l’amour à vingt et à trente ans
    J’ai vécu comme un fou et j’ai perdu mon temps
    Tu n’oses plus regarder tes mains et à tous moments je voudrais sangloter
    Sur toi sur celle que j’aime sur tout ce qui t’a épouvanté
    Tu regardes les yeux pleins de larmes ces pauvres émigrants
    Ils croient en Dieu ils prient les femmes allaitent des enfants
    Ils emplissent de leur odeur le hall de la gare Saint-Lazare
    Ils ont foi dans leur étoile comme les rois-mages
    Ils espèrent gagner de

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